Par l'entremise de Carla et Lucia, deux ouvrières d'une tannerie portugaise, le film explore plusieurs pistes. Il fait d'abord la description d'un métier dur et ingrat malgré sa mécanisation : chaleur, humidité, odeurs nauséabondes, équipement de protection sommaire. Est également dépeint un mode de vie prédominant dans les régions semi-rurales et s'éteignant aujourd'hui, alliant le travail à l'usine et la paysannerie (culture des oliveraies, élevage). Et par petites touches, le passé colonial du Portugal est évoqué au travers des souvenirs conjugaux, quelquefois amers, des deux femmes.
La mise en scène par son cadrage, sa lumière, sa photographie hyperréaliste, sa façon de filmer la matière, la peau (animale et humaine), son goût de la nature morte, repousse le documentaire aux frontières de la fiction. Ce parti-pris est relayé par le leitmotiv du personnage de Patricia, une troisième ouvrière qui a disparu mystérieusement et dont on doute de l'existence presque jusqu'à la fin du film . N'est-elle pas la métaphore de l'agonie de cette tannerie qui semble vivre ses derniers moments ?