Les Âmes mortes

Au cours de son travail de recherche pour son unique film de fiction, Le Fossé, réalisé en 2007, Wang Bing a initié une collecte de témoignages des rescapés des camps de Jiabiangou et de Mingshui, construits en Mongolie suite à la politique de redressement idéologique lancée par Mao en 1957. De cet épisode encore sévèrement censuré en Chine, il tire une somme de documents d’une terrifiante précision. Plusieurs années après, Wang Bing rend à nouveau visite à ses témoins qu’il voit disparaître les uns après les autres. Ces couches d’époques différentes (Années 50, années 2000, années 2010) donnent au spectateur un sens extrêmement fort du passage du temps, du caractère précieux de ces témoignages interdits qui sont en passe de disparaître. Ils constituent également un véritable tombeau pour ces victimes silencieuses et invisibles du communisme, à l’image de cette stèle qu’un des protagonistes du film tente de maintenir debout dans le désert de Gobie, en dépit des bulldozers des autorités qui s’efforcent de la disperser.