Grande Fugue

Jean Oury introduit la psychothérapie institutionnelle dans la clinique de Saumery près de Chambord en 1949, année de création par Pierre Henry et Pierre Schaeffer de Symphonie pour un homme seul. Sarah Klingemann propose aux soignés et aux soignants de la clinique des séances d'écoute musicale, de Robert Schumann à Morton Feldman, de Franz Schubert à Alan Vega. Grande fugue joue élégamment à saute-mouton avec la ligne de démarcation des musiques diffusées jusqu'à donner l'impression que le in est du off et inversement. Le décalage du son par rapport à l'image induit, avec l'indétermination relative de sa source d'émission, une propension à l'intériorisation. Les musiques écoutées deviennent alors les paysages sonores des patients de l'institution dont les solitudes hésitent entre assonances et dissonances. Si l'ouïe est la vue du dedans comme le dit Pierre Schaeffer dans un carton, Grande fugue donne à voir, dans un montage subtilement atonal, ce que nomme mal la folie qui, ici, se parle moins qu'elle s'écoute.