Martirio

Martírio prend le temps de raconter cette histoire dans la durée en s’appuyant sur des images tournées depuis près de trente ans jusque dans l’enceinte du Parlement fédéral. Martírio met ainsi à jour les inexorables et insidieux mécanismes coloniaux toujours à l’oeuvre au Brésil. La permanence des intérêts des grands propriétaires prêts à subvertir à leur profit les lois du pays, pour expulser toujours plus loin les aborigènes, est clairement montrée sous tous ses aspects. La violence politique, comme le harcèlement quasi quotidien dont sont victimes les familles amérindiennes, est patente. La durée du film permet à Vincent Carelli de faire entendre la parole des anciens, rencontrés trente ans auparavant, et qui racontent une autre vie, une autre mémoire. Celle d’un peuple premier empêché, dépourvus de titres de propriété, et dont le destin est suspendu à des décisions prises à milliers de kilomètres de là. Cette tragédie américaine, Carelli la filme à leurs côtés, au plus près d’eux, de leurs chants et de leurs morts. La stupeur, puis l’effroi, enfin la colère nous saisissent, devant l’implacable martyrologie des Kaiowá du Mato Grosso do Sul.