Pendant 5 ans Jonas Trueba filme la jeunesse madrilène. Au final une œuvre de 3 heures et demie divisée en 3 parties, séparées par deux entractes, après une introduction qui, sous l’aspect d’une mosaïque de visages en visioconférence, pose les règles du jeu : le film sera une expérience immersive, les participants devront « créer à partir d’eux-mêmes », se mettre en scène, jouer des situations d’après leurs propres expériences. De 2016 à 2021, le covid est passé par là, les 9 protagonistes ont quitté l’adolescence pour l’âge adulte, les préoccupations et interrogations ont changé, les coiffures et apparences vestimentaires ont évolué, les traits ont mûri, ils ne sont plus filmés en groupe et en direct, mais leurs visages constellent désormais l’écran des ordinateurs
Pour cette œuvre au long cours, qui s’inscrit dans le genre du « coming of age film », Jonas Trueba choisit une forme très éclatée qui varie les dispositifs et les propositions de représentation : portraits de groupe ou individuels, personnages filmés par paires côte à côte, entretiens en plan fixe ou caméra mobile dans les rues de Madrid, séquences purement documentaires et d’autres entièrement mises en scène. Le film assume son penchant fictionnel dans la deuxième partie, qui relate sur un ton élégiaque, les romances amoureuses et ensoleillées, surtout celle de Candela et Sylvano, le couple charismatique du film. S’ensuivra un rude retour à la ville et à la réalité hivernale avant, pandémie aidant, l’émiettement du groupe, et la préfiguration de la fin de la fin de la jeunesse. Un film très libre qui propose une forme inédite pour un genre cinématographique plusieurs fois visité par d’autres (Richard Linklater, Sébastien Lifshitz).